pour l'exemple - Proviseur révoqué

Proviseur révoqué

Pour l'exemple

Parce qu’il a parlé de son homosexualité sur son blog, un proviseur de Mende a été menacé de révocation, puis suspendu de son poste. Une affaire qui en dit long sur les rapports toujours conflictuels existant entre Education Nationale et homosexualité. Entretiens avec le principal intéressé, mais aussi le secrétaire général de la FSU et le webmaster du site de blogs.

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Proviseur révoqué

Mis en ligne le 20/02/2006

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Par Jean-François Laforgerie

Rappel des faits

Des centaines de messages de soutien, des courriers des enseignants et d’élèves du lycée de Mende (Lozère) où il exerçait, des blogs qui le défendent et suivent l’affaire, une mobilisation des associations LGBT et des syndicats professionnels d’enseignants, le moins qu’on puisse dire c’est que la révocation, le 30 décembre, du chef d’établissement M. C. a fait grand bruit. A tel point que le ministère de l’Education Nationale a compris (vingt jours plus tard) qu’il lui fallait impérativement déminer le terrain en annonçant, qu’une "décision mieux proportionnée (…) serait prise". En fait, M. C. a échappé à la peine la plus infamante : la révocation. Reste une question, que lui reproche-t-on vraiment ?

Tout démarre à l’automne par une dénonciation (du fait d’enseignants du second lycée de Mende selon le ministère) : le chef d’établissement a créé un blog où, sous le pseudonyme de Garfieldd, il raconte depuis deux ans sa vie au lycée, ses problèmes professionnels, sa vie sentimentale et parle de son homosexualité. On y trouve, entre autres images, quelques rares photos d’hommes en caleçon ou en slip. Il n’en faut pas davantage pour que la machine infernale s’emballe.

Saisi le rectorat de Montpellier, en lien avec le ministère de l’Education Nationale, lance une enquête. Ils considèrent que les éléments trouvés sur le blog sont "pornographiques et donc incompatibles avec les fonctions de proviseur" (1). Le 20 octobre, M. C. est convoqué au rectorat de Montpellier et suspendu. Une procédure disciplinaire est alors engagée. Il comparaît devant une commission le 9 décembre. Il est révoqué le 30. Décision qui lui est notifiée le 9 janvier. Le 11 janvier, l’ex-chef d’établissement introduit un recours gracieux auprès du ministre. L’administration rend publique cette sanction (fait rare), la presse s’emballe.

Dès la sanction connue, le Syndicat des personnels de direction de l’Education nationale lui apporte son soutien. "Dans ce dossier, il n’y a pas de preuve formelle, circonstanciée d’un caractère répréhensible de quelque nature que ce soit, note un représentant du syndicat. Or il écope de la sanction la plus grave et la plus définitive qui puisse toucher un fonctionnaire, sans qu’aucune poursuite judiciaire n’ait été entamée" (2). Et pour cause : rien ne peut légalement lui être reproché. Le malaise s’installe. D’autant que l’administration avance continuellement l’argument de la pornographie sur le blog (jamais prouvée du reste) pour justifier cette sanction d’exception. De surcroît, des explications maladroites de l’administration laissent entendre que l’homosexualité du proviseur n’a pas joué dans la décision. Qui peut le croire ? Du coup, on se demande si ce n’est pas la trop grande liberté de critique du proviseur envers son ministère de tutelle (sur son blog, il est assez sévère) qui est ici sanctionnée derrière l’imparable attaque sur la pornographie.

(1)"Libération" (17/01). Interview de Paul Desneuf, directeur de l’encadrement à l’Education Nationale.
(2) "Le Monde" (20/01).

Une pétition de soutien a été lancée sur Internet. Elle est accessible sur : voir la pétition.

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